RENFORCER la prérogative et libérer le potentiel des experts-comptables
Sous titre
S’ENGAGER concrètement dans l’attractivité de la profession
Le statut de tiers de confiance, pour quoi faire ?
Historiquement dévolu principalement aux experts-comptables, mais également aux avocats et aux notaires, le statut de tiers de confiance a été officiellement reconnu par la loi de finances rectificative pour 2010, laquelle a introduit l’article 170 ter du Code général des impôts. Ce dispositif législatif permet aux contribuables soumis à l’obligation de dépôt d’une déclaration annuelle de revenus souhaitant bénéficier de déductions, de réductions ou de crédits d’impôts, de remettre les pièces justificatives des charges correspondantes à un tiers de confiance.
A ce titre, le contribuable doit avoir contractualisé avec ce tiers de confiance et lui avoir donné un mandat spécifique. En retour, le tiers de confiance s’engage à télétransmettre les déclarations annuelles de revenus de ses clients à l’administration fiscale, sous réserve de leur accord explicite. En outre, le tiers de confiance doit être prêt à communiquer, sur demande de l’administration fiscale, les pièces justificatives des charges.
Dans ce contexte, le rôle de tiers de confiance implique une responsabilité considérable, car il s’agit non seulement de garantir l’exactitude des informations transmises, mais aussi de maintenir la confidentialité et la sécurité des données des contribuables. Les experts-comptables, en tant que tiers de confiance, jouent un rôle clé dans la conformité fiscale des entreprises et des particuliers, en veillant à ce que toutes les déclarations soient effectuées de manière précise et en temps voulu.
Aujourd’hui, le statut de tiers de confiance a évolué et s’est particulièrement ancré dans la profession d’expert-comptable.
Cette évolution est illustrée par plusieurs décrets récents qui ont renforcé le rôle des experts-comptables en tant que tiers de confiance. Par exemple, le décret n° 2020-1328 du 2 novembre 2020 relatif aux fonds de solidarité dispose que le chiffre d’affaires de certains secteurs sous-traitants d’autres secteurs sinistrés doit être attesté par un expert-comptable, agissant en tant que tiers de confiance, afin que ces secteurs puissent bénéficier de l’aide financière. De même, le décret n° 2021-310 du 24 mars 2021 instituant l’aide « coûts fixes » exige que l’expert-comptable, en tant que tiers de confiance, calcule et atteste l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE) de son client afin que ce dernier puisse prétendre à l’aide. Un autre exemple est le décret n° 2021-311 du 24 mars 2021 relatif aux remontées mécaniques, qui prévoit également que l’expert-comptable, tiers de confiance, doit attester de l’EBE de l’exploitation pour que celle-ci puisse bénéficier d’une aide spécifique.
Ces textes législatifs et réglementaires confirment et renforcent le statut de tiers de confiance des experts-comptables, sans que ces derniers aient à remplir des formalités supplémentaires particulières. Ce statut est donc reconnu de facto par la législation actuelle, ce qui confère aux experts-comptables une autorité et une responsabilité accrues dans la validation et la transmission des informations fiscales.
À l’avenir, le statut de tiers de confiance pourrait évoluer davantage pour intégrer les avancées technologiques et les besoins croissants de digitalisation. Une possibilité consisterait à accorder aux experts-comptables disposant d’une signature électronique le statut de tiers de confiance numérique. Cette évolution permettrait de garantir et d’authentifier les documents électroniques des experts-comptables ainsi que ceux de leurs clients, renforçant ainsi la sécurité et la fiabilité des échanges numériques.
Dans cette perspective, les experts-comptables pourraient offrir une gamme complète de services numériques sécurisés. Par exemple, ils pourraient certifier ou contresigner un acte numérique dont leur client est l’un des co-contractants, conférant à cet acte toute la valeur probante nécessaire. De plus, ils seraient habilités à acheminer la correspondance électronique de leurs clients via des dépôts sécurisés ou recommandés. Ils pourraient également proposer des échanges sécurisés et la conservation de documents électroniques dans des coffres-forts numériques, assurant ainsi la pérennité et la protection des données sensibles.
En garantissant la valeur probante des documents grâce à un archivage électronique sécurisé, conforme aux normes AFNOR de sécurité établies par la Fédération Nationale des Tiers de Confiance (FNTC), les experts-comptables offriraient un service dynamique sur ces documents. Cela inclurait des rappels de fin de contrat, des échéances, et d’autres fonctionnalités pratiques qui faciliteraient la gestion documentaire pour leurs clients.
En outre, dès lors qu’un expert-comptable a une lettre de mission signée avec son client, il pourrait être considéré comme ayant un mandat implicite pour agir au nom de son client, au même titre qu’un avocat. Cela permettrait aux experts-comptables d’étendre leur rôle et d’intervenir plus facilement, sans devoir disposer d’un mandat express, dans davantage de démarches administratives et juridiques au nom de leurs clients, simplifiant ainsi les processus et augmentant l’efficacité des services rendus.
Le statut de tiers de confiance repose sur deux piliers essentiels : la confiance et la sécurité. La confiance revêt une importance primordiale car les clients doivent être assurés que les informations qu’ils transmettent à leur expert-comptable seront traitées avec le plus grand soin et dans le respect de la confidentialité. Cette confiance se construit par la transparence des procédures, la compétence et l’éthique professionnelle de l’expert-comptable.
La sécurité, quant à elle, est cruciale pour protéger les données sensibles des clients contre les cyberattaques, les pertes de données et les accès non autorisés. Les experts-comptables doivent donc adopter des technologies de pointe et des protocoles de sécurité rigoureux pour garantir la protection des informations qu’ils manipulent. Cela inclut l’utilisation de systèmes de chiffrement, de pare-feu, de logiciels antivirus, et de pratiques de gestion des mots de passe robustes.
En combinant ces deux éléments, les experts-comptables peuvent offrir un service de tiers de confiance répondant aux exigences les plus strictes en matière de sécurité et de confidentialité. Cela renforce leur position de partenaires indispensables pour les entreprises et les particuliers dans la gestion de leurs obligations fiscales et administratives.
L’évolution vers un statut de tiers de confiance numérique représente non seulement une réponse aux besoins actuels de digitalisation, mais aussi une opportunité pour les experts-comptables de se positionner à l’avant-garde de l’innovation dans leur domaine. En adoptant les nouvelles technologies, ils peuvent améliorer l’efficacité de leurs services, réduire les délais de traitement et offrir une expérience client plus fluide et plus sécurisée.
Les avancées technologiques telles que la blockchain, par exemple, pourraient jouer un rôle clé dans cette transformation. La blockchain permet de créer des registres de transactions sécurisés et immuables, ce qui peut être extrêmement utile pour la certification et la conservation des documents numériques. En intégrant la blockchain dans leurs processus, les experts-comptables pourraient offrir une couche supplémentaire de sécurité et de transparence à leurs clients.
De plus, l’intelligence artificielle (IA) et l’apprentissage automatique offrent la possibilité d’automatiser certaines tâches répétitives et d’analyser de grandes quantités de données plus rapidement et avec une précision accrue. Cela permettrait aux experts-comptables de se concentrer davantage sur les tâches à haute valeur ajoutée, telles que le conseil stratégique et l’accompagnement des clients dans leur développement.
Enfin, le statut de tiers de confiance a évolué depuis son attribution initiale aux experts-comptables, avocats et notaires. Aujourd’hui, ce statut est étroitement associé aux experts-comptables, en raison de leur rôle central dans la validation et la transmission des informations fiscales. À l’avenir, le développement du tiers de confiance numérique pourrait transformer encore davantage notre profession, en intégrant les avancées technologiques pour offrir des services plus sécurisés et plus efficaces.
Les experts-comptables, en adoptant ces nouvelles technologies, pourront renforcer la confiance de leurs clients et garantir la sécurité des informations qu’ils traitent. Ils pourront ainsi continuer à jouer un rôle clé dans la conformité fiscale et administrative, tout en offrant des services innovants et adaptés aux besoins de l’ère numérique.
En résumé, l’évolution du statut de tiers de confiance reflète les changements profonds qui traversent la société et l’économie, notamment en termes de digitalisation et de sécurité des données. Les experts-comptables, en tant que tiers de confiance, sont à la pointe de cette évolution et sont bien positionnés pour accompagner leurs clients dans cette transition vers un monde de plus en plus numérique et interconnecté.
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